vendredi 10 mai 2013

Vingt-sept

.1 Gatsby le magnifique

Texte anglais :

« The only completely stationary object in the room was an enormous couch on which two young women were buoyed up as though upon an anchored balloon. They were both in white, and their dresses were rippling and fluttering as if they had just been blown back in after a short flight around the house. I must have stood for a few moments listening to the whip and snap of the curtains and the groan of a picture on the wall. Then there was a boom as Tom Buchanan shut the rear windows and the caught wind died out about the room, and the curtains and the rugs and the two young women ballooned slowly to the floor. »

Texte français (traduction de Philippe Jaworski) :

« Le seul objet absolument fixe de ce lieu était un immense canapé sur lequel deux jeunes femmes flottaient comme dans une nacelle à l'amarre. Elles étaient toutes deux vêtues de blanc, leur robe parcourue de frissons et de friselis, comme si la brise les eut ramenées à l'intérieur après un vol rapide autour de la maison. J'ai dû demeurer un instant sans bouger à écouter les rideaux claquer, et gémir un tableau accroché au mur. Puis il y eut un bruit d'explosion lorsque Tom Buchanan ferma les fenêtres de derrière ; prisonnier de la pièce, le vent expira, et les rideaux, les tapis et les deux jeunes femmes dans leur montgolfières redescendirent lentement à terre. »

.2 Traduction

Les passages mis en relief illustrent bien les difficultés de la traduction. Dans le premier cas, des verbes remplacent des noms, l'onomatopée de « claquer » étant, il me semble, moins forte que le « whip and snap » anglais. Inversement, dans le second cas, la souplesse de l'anglais, où il est plus facile qu'en français de faire un verbe d'un nom, crée une image bien plus saisissante que la périphrase de la traduction, notamment grâce aux belles allitérations « o/ou ».

.3 L'adaptation cinématographique de Baz Luhrmann

La conclusion de la critique de A. O. Scott du New York Times, Shimmying Off the Literary Mantle :
« ... a movie that is otherwise gaudily and grossly inauthentic. Jay Gatsby is too, of course. He is self-invented and also self-deluded, spinning out fantasies for himself and others as easily as he gives parties. As a character in Nick’s ruminations, in Fitzgerald’s sentences and in our national mythology, he is a complete mess. This movie is worthy of him. »

.4 Lire, relire

J'avais entrepris la lecture du roman dans les années soixante-dix, lors de la sortie du film de Jack Clayton, avec notamment Robert Redford et Mia Farrow -- le scénario étant écrit par Francis Ford Coppola. Entrepris, mais pas terminé, ne le trouvant pas très intéressant. Lire, c'est un peu comme vivre, un long apprentissage, avec des avancées, des reculs, des succès et des échecs. Mais, contrairement à la vie, on peut reprendre un livre. Aimer ce qu'on a ignoré ou dédaigné, ou l'inverse, trouver banal ce qui nous avait séduit. Et pourtant plusieurs estiment que relire n'est que du temps perdu. Grave erreur, à mon avis : car pas plus que l'homme ne se baigne deux fois dans le même fleuve, il ne lit deux fois le même ouvrage...

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