jeudi 14 février 2013

Six

Serenity now

Je rentre de ma piquerie juste à temps pour le five o'clock, lequel, chacun le sait, se prend à 16 heures. Il sera vert et chinois, cela va de soi. Le trajet depuis Cartierville est d'environ une heure de bus et de métro, assez pour quelques lignes et photos. Pour mémoire, quoique ce détail n'a que peu d'importance -- qui s'en souviendra demain -- quel bel après-midi, avec un léger redoux ensoleillé, pas assez pour inonder les trottoirs et rendre la marche désagréable, mais laisser sur la joue la sensation du contact avec le drap fraichement lavé (et pour les plus zélés d'entre nous, repassé). La piquerie, j'en sors toujours fort serein, et bien détendu. Piquerie ? Je pressens un sourcil interrogateur, voire désapprobateur. Autre détail pour mémoire : je me souviens de l'effarement d'un médecin de mes amis, aussi minutieux que consciencieux, au vu de ce terme dans ma correspondance, et de me téléphoner sur le champ. Piquerie : lisez le cabinet d'acupuncture que je fréquente, c'est, si on veut, l'absinthe de mon spleen. C'est ainsi que, tout bois, je suis sujet au vent qui trouble l'harmonie entre mes yin et yang : que j'aime ces métaphores de la médecine de Chine.

Halte à la librairie, où un livre m'attend depuis quelques semaines, et que rhume et bronchite oblige, je n'ai pu aller chercher, mais comme j'ai entrepris la lecture d'un de mes livres à livres -- De livre en livre, de Michel Cournot, commentaire à suivre sur Les cendres et le Plumeau -- je me suis procuré deux titres d'Henri Michaux, Un barbare en Asie et Ecuador, grâce auxquels je voyagerai dans les semaines à venir avec beaucoup plus d'agrément que toute la transhumance touristique. Agréable conversation avec le libraire, toujours d'un fort agréable commerce, échanges usuels sur nos états de santé respectifs, je le voyais amaigri -- à tort, une coupe de cheveux vous change -- il m'a, pour l'interminable bronchite, comparé à Bush le père : égalité des points.

Autre halte à la boucanerie -- qu'auriez-vous dit sur fumerie ? de la rue Marquette, et re-brin de causette.

Le reste du trajet, à pied.

mercredi 13 février 2013

Cinq

 Le souk de l'inculture

Trouvé cet article sur un blog. Quelle idée d'aller dans ce souk. On y trouve pas de livre, que des produits. Renaud-Bric-à-Brac est une sorte de Costco de l'inculture.

L'affaire Blaise-Renaud-Bray et Philippe Béha | Le lecteur

lundi 4 février 2013

Quatre

Pierre FOGLIA, Un papier blanc sur la table (extraits), La Presse, 4 février 2013.

Mon premier Foglia de 2013, deux extraits de cet article. Le premier sur le peu de cas qu'on fait de la langue -- la nôtre -- ici au Québec, à moins de se complaire dans la médiocrité --j'ai encore les pages d'André Major à l'esprit, mais j'y reviendrai. Le second, qui appelle un o tempora, o mores, car ce n'est pas la gloire du monde qui passe, mais l'ignorance qui s'installe, et elle aussi, on s'y  complait.

« PÉPÈRE LA VIRGULE - Boulevard Saint-Laurent, juste avant d'arriver à Viger, un panneau avertit les automobilistes : Attention, 1 seul voie sur Viger, option par René-Lévesque. La faute - en lettres d'au moins 30 cm de haut - frappe comme une brique dans le front.

Ce n'est pas la faute qui frappe, c'est qu'elle reste là et que personne ne se donne la peine de la signaler. La signalerait-on, personne ne la ferait corriger.

Ce genre de faute n'est pas qu'une faute, c'est une putain de verrue dans le visage francophone de Montréal. »
[...]
« MALLARMÉ JEUDI APRÈS-MIDI - L'autre après-midi, ma librairie était pleine de jeunes gens, étudiants dans la vingtaine de l'Institut de tourisme voisin. Leur liste de lectures à la main, ils venaient chercher leurs livres pour le cours de littérature. Celle-ci avait oublié d'en noter un, elle cherchait à haute voix, voyons, c'est le nom d'un arbre...

C'est pour un cours de littérature québécoise ?
Oui.

Alors c'est L'Amélanchier, de Ferron.

C'est ça ! Vous l'avez lu, monsieur ?

Oui, mademoiselle. Un grand livre. Elle prit encore Les aurores boréales, La Peste, Les Cantouques de Godin...

Ceux-là aussi, vous les avez lus, monsieur ?

Oui. Je retirai le Godin de sa pile. Ce monsieur-là habitait juste de l'autre côté de la rue, au square Saint-Louis, avec sa blonde, la chanteuse Pauline Julien. Vous avez entendu parler de Pauline Julien ?

Jamais. Elle prit encore La ferme des animaux, d'Orwell.

Ça, par contre, mademoiselle, c'est plate longtemps...

Vous avez lu tous les livres, vous, alors ?

Et la chair est triste, hélas.

Pardon ?

Rien. »
Bien triste en effet, la chair, et l'esprit aussi tant qu'à y être. Et pourtant, cela ne scandalise personne; il est vrai que ce n'est pas comme la représentation de la violence à la télé, réaliste ou pas. Mais, pour moi, c'est une violence encore bien pire : une violence contre la langue, c'est une violence contre soi -- une violence identitaire. Quand à l'ignorance...

dimanche 3 février 2013

Entre Trois et Quatre

Écrire la vie

La fatigue découlant de la récente maladie ...

André Major et ses carnets. 

Écrire la vie : Montaigne, Stendhal, Proust, cours 2008-2009.

Trois

Coryza, rhume ? Que nenni non point. Bronchite, que le médecin a diagnostiqué au seul son de ma respiration. Pour l'heure, et quelques jours encore, je suis sous traitement aux antibiotiques et en bonne voie de rétablissement. Tous me l'ont dit, j'aurais dû consulter plus tôt... Mais voilà comme l'on est, toute illusion sur sa propre condition, et le déni n'en est pas la moindre conséquence, et la crainte de Diafoirus encore plus que de la maladie.

Tout s'explique donc, ma fatigue, les palpitations et le manque d'énergie.

vendredi 25 janvier 2013

Deux

Audace


« ...et où l'adverbe, chose rare, pétille son verbe. »

Je sens qu'on va me quereller pour ce « pétille son verbe », quelle audace de mettre un complément d'objet direct à un verbe intransitif ! C'est ainsi que je le sens, et si vous lisez Vialatte, vous verrez que j'ai raison.

mercredi 23 janvier 2013

A. D. 2013, numéro UN

Rassurez-vous, chalands, la boutique est toujours ouverte, et l'on n'a ni mis la clef sous la porte ni quitté ces affaires qui occupent, le plus souvent avec délices, nos jours et, l'âge venu et le fils d'Hypnos et de Nyx ne nous tendant plus ses bras qu'avec la plus grande économie, nos nuits. Alors que le commerce s'adonne, en janvier, aux soldes, l'on aura, ici, procédé à un petit inventaire du bout de l'an des cent cinquante-six articles, et trente apostilles, publiés -- quel bilan en tirer ? et profité du début du nouvel, pour effectuer, nous qui sommes du dernier sédentaire, un déplacement hors les murs, qui nous aura mené sur la côte du Maine. Pour enchanteresse que soit la déambulation sur la plage au mois de janvier, que l'on imagine propice à la lecture, l'alternance froid-chaud s'avère traîtresse, et bien cruelle quand s'installe chez soi un coryza, et comme à demeure depuis, lequel aura eu raison de nos meilleures intentions, et de toutes nos énergies, et nous aura contraint, sinon à baisser le rideau, du moins à une inaction forcée qui n'aura rien eu du farniente.

Bien peu de lecture, donc, hormis les récits de Tchékhov, mais une écoute attentive du cours, donné en 2009 au Collège de France, par Antoine Compagnon et intitulé Écrire la vie : Montaigne, Stendhal, Proust, sur lequel j'aurai l'occasion de revenir dans ma page principale.

Ogunquit, Maine, janvier 2013